SURPRISE BOTANIQUE N°4 : ALBIZIA JULIBRISSIN (ARBRE DE SOIE, MIMOSA OUACACIA DE CONSTANTINOPLE, ARBRE DORMEUR, DORMEUR DE NUIT)
A la fin du mois de juin j’ai fait avec quelques amies jardinières un petit voyage dans les jardins de l’Anjou. Une canicule s’annonçait et la chaleur froissait et malmenait la plupart des fleurs et privait rapidement les jardins de leur palette colorée. Dans ce contexte un peu décevant, j’ai été éblouie par un arbre tout paré de fleurs roses et lumineuses qui semble accueillir cette chaleur avec plaisir. J’apprenais que l’arbre était un Albizia ou Arbre de Soie et qu’il diffusait un merveilleux parfum pendant la nuit. A partir de ce moment je le voyais partout.
Les Albizias sur la place de la Mairie à Cheviré le Rouge
La petite commune de Cheviré le Rouge près d’Angers a planté toute une rangée de ces arbres ; on peut supposer non seulement pour leur magnifique floraison, mais également pour leur port très étalé qui abrite le promeneur du soleil. L’arbre ne pousse pas très haut, 20 m sont un maximum et dans ce cas sa largeur peut dépasser sa hauteur. Il peut avoir d’autres formes si le terrain qui lui est imparti ne lui suffit pas pour s’étaler. Comme indiqué dans le titre, l’arbre possède plusieurs noms vernaculaires qui méritent une explication. Commençons par » l’Arbre de Soie » appelé ainsi à cause de ses fleurs soyeuses. Regardons de près la photo suivante :
Les fleurs de l’Albizia
Sur une branche nous voyons les fleurs d’Albizia à plusieurs stades de leur développement. Il y a d’abord un grand nombre de glomérules, ce qui montre que la floraison vient de débuter. Les glomérules, ce sont ces petites boules vertes composées chacune de nombreux boutons de fleurs qui s’ouvriront bientôt et formeront ensemble une panicule ou un bouquet de fleurs. Deux panicules, vues de côté, sont pleinement déployées. Les nombreux fils soyeux qui les composent ne sont pas des pétales, non, ce sont des étamines, blanches à la base, puis d’un rose vif. Dans l’angle inférieur gauche, une panicule nous permet de voir son intérieur. On distingue les corolles des fleurs, toutes discrètes et soudées, d’où sortent ces étonnantes masses d’étamines. Ces dernières portent certainement des anthères, mais elles ne sont pas visibles sur cette photo. Un peu au-dessus, deux panicules se sont détachées de la branche et sont en train de se dessécher. Elles aussi nous permettent de distinguer l’ensemble des fleurs.
Agrandissement de panicules
Mon appareil photo a mieux fait qu’une loupe botanique. J’ai ramassé deux panicules sous l’arbre pour les observer de plus près. Ici on voit premièrement les anthères au bout des étamines et deuxièmement les corolles soudées de 5 pétales, libres en haut de quelques mm. A la base de la corolle, on peut même deviner le calice de sépales, également soudé. Ce que je ne peux pas montrer sur ces photos, c’est la partie femelle de la fleur, car elle est encore plus discrète que la corolle et le calice et cachée au milieu des longues étamines : un pistil à un seul carpelle, style et stigmate sont minuscules. (Pour les éléments de botanique descriptive : « Dictionnaire Visuel de Botanique » de Maurice Reille, chez Ulmer, prix botanique du Lude, 2015.)
Les feuilles de l’Albizia
Les feuilles de cet arbre exotique lui ont valu les noms d’ » arbre dormeur » et « dormeur de nuit ». Elles sont très grandes, de 20 à 30 cm, et très découpées en grandes folioles qui elles sont à nouveau très découpées et très sensibles, capables de se refermer. Elles nous font penser aux feuilles du Mimosa avec lequel il y a une parenté. L’Albizia fait partie comme le Mimosa et l’Acacia de la famille des Fabaceae et plus précisément de la sous-famille des Mimosoideae. A la tombée de la nuit l’Abizia laisse pendre ses feuilles pour ne les redresser qu’au début du jour. Ce mouvement est connu depuis l’Antiquité pour beaucoup de plantes de la famille des Fabaceae. On sait aussi que Darwin en a trouvé 300 pour prouver que les plantes peuvent bouger. Si on intervient artificiellement dans le « sommeil » de ces plantes, si on les éclaire pendant la nuit, elles dépérissent. Cette caractéristique de « dormir » que possède aussi l’Albizia est décrite dans le détail par Germinal Rouhan dans son livre « L’Herbier Essentiel des plantes remarquables et surprenantes », page 76 (Chez Glénat).
Les fruits de l’Albizia
Comme pour toutes les plantes de la famille des Fabaceae, les fruits de l’Albizia sont des gousses. Sur ma photo on les reconnaît bien ; elles ont pris la place des glomérules. Cependant, comparé à la masse de fleurs, on pourrait juger le nombre de fruits réduit. Et pourtant, l’arbre produit tellement de fruits, de petites graines contenues dans les gousses, qu’il a été déclaré invasif dans certaines régions des Etats Unis. Une autre caractéristique de sa famille dont il bénéficie, est la fixation de l’azote atmosphérique par ses racines à l’aide d’une bactérie.
Le sol en-dessous de l’arbre
Il nous reste à chercher la raison de ses noms « mimosa ou acacia de Constantinople ». En effet, ces noms parlent de ses origines, de Perse et d’Asie Mineure et aussi du naturaliste Filipo degli Albizzi qui l’a introduit au 18° siècle en Italie en rapportant des graines de Constantinople. L’arbre lui est dédié. En découvrant le sol sous l’Albizia jonché de plusieurs couches de fleurs tombées et desséchées, je me suis souvenue d’un conte des Frères Grimm : La fille du meunier doit filer de la paille et la transformer en or. Alors ici, avec la paille des fleurs d’Albizia , le roi l’aurait certainement obligée à filer de la soie ?
SOLUTION DE LA DEVINETTE 3
Il s’agit de grands arbustes de Rhododendrons et de Pieris au Jardin de Kerdalo au mois de mai.
DEVINETTE 4
Pendant nos visites au mois de juin, nous avons rencontré de nombreuses fois cette liane débordant d’un mur de jardin. Elle, tout comme l’Arbre de Soie, adore la chaleur. Quel est son nom ?
 
                        