CHRONIQUE BOTANIQUE N° 55 UN NOUVEAU DEPART POUR LE JARDIN DES SIMPLES 

Un accueil princier au jardin des simples

Le nom « jardin des simples « fait référence aux jardins des monastères du Moyen Âge dans lesquels les moines cultivaient les simples, les plantes médicinales, pour soigner les malades  en général et spécialement ceux de leurs hôpitaux.  On était loin de la pharmacopée actuelle. Souvent les plantes médicinales ont aussi des vertus aromatiques et condimentaires.  Les moines cultivaient les simples dans les carrés surélevés qui regroupaient les plantes soignant un organe en particulier, le cœur, les poumons, l’intestin, les déformations des membres, les yeux, la peau, etc. En même temps ce jardin était un lieu de détente et de méditation. On pouvait y trouver des bancs pour se reposer, des tonnelles pour être à l’ombre, une fontaine pour donner de la fraîcheur et la possibilité d’arrosage. 

 Jocelyne, la responsable du jardin des simples expliquant ses plantations pendant l’ouverture des jardins les 3 et 4 juin. 

Depuis  une quarantaine d’années les recherches sur les jardins médiévaux se sont multipliées en archéologie ainsi qu’en littérature et en histoire de l’art. Dès ses débuts ce courant savant a passionné beaucoup de jardiniers et amis des jardins. Partout en France, dans des monastères, des prieurés,  d’anciennes fermes et des lieux fortifiés, on a essayé de recréer des jardins médiévaux. Quoi de plus naturel que la Cité Plantagenêt se pare d’un tel petit paradis ?  Si nous donnons aujourd’hui le nom jardin des simples à notre jardin, nous devons toujours être conscients que notre coin de terre ne sera qu’une très vague interprétation de ce qui se pratiquait en ces temps lointains. Nous n’allons pas résister à l’envie de planter  des végétaux inconnus à cette époque. Christophe Colomb n’avait pas encore découvert les  Amériques et leurs richesses botaniques. Tous les grands explorateurs des siècles suivants n’avaient pas encore rapporté les plantes des quatre coins du monde. Et nous n’allons pas utiliser nos plantes  pour soigner de grands malades. Mais cela n’a aucune importance. Ce que nous cherchons aujourd’hui en imaginant notre jardin des simples, c’est de trouver un esprit, une atmosphère qui nous manquent, un lieu qui respire la paix, la beauté, propice à la détente et qui nous donne la possibilité d’être en liaison avec quelque chose qui a existé jadis et qui nous paraît être un symbole d’équilibre et de sagesse.

Accueil des visiteurs par la présidente de EC&J

Ce que les visiteurs ont vu le week-end des 3 et 4 juin 2023 est un nouveau départ vers ce jardin de bienfaits. Le jardin a été confié à l’association EC&J par la mairie du Mans. Sa première mouture en 2017 a vu apparaître ces plates-bandes courbées et plantées d’espèces médicinales, aromatiques et condimentaires par familles végétales à la manière d’un jardin botanique.  Il s’est vite éloigné de l’idée initiale du jardin des simples. 

Deux nouvelles pergolas pour apporter de l’ombre au jardin des simples     

Jocelyne Maufay , depuis 2022 la responsable, s’est vite rendu compte que ce jardin des simples, exposé pendant la plus grande partie de la journée au soleil, manquait cruellement d’ombre et de recoins pour s’abriter et s’asseoir pour méditer, s’il voulait être digne de ce nom. Quelle chance alors que les ateliers municipaux se soient prêtés au jeu en fabriquant  et en lui offrant de très beaux berceaux et pergolas en ruban de métal croisé. Nous connaissons déjà de telles tonnelles au parc Monod ou au parc Victor Hugo.  Leur installation change totalement l’aspect et l’ambiance du jardin, le rend plus intime, le rapproche davantage d’un jardin de détente. La photo nous montre deux pergolas ; celle de droite est adossée au mur et son toit est envahi par une multitude de magnifiques roses. Autrement on aurait dû couper ces roses, leurs  branches n’étant plus capables de supporter leur poids. Donc la nouvelle pergola les accueille gracieusement et vient juste au bon moment pour transformer un endroit problématique en un lieu idyllique. (Voir aussi la photo 2). 

La deuxième pergola est encore assez nue. Un rosier- liane a été planté  sur le côté au printemps, développant un étonnant feuillage et  pointant une première fleur près du sol. La pergola suit la courbure du banc en pierre. Nous devons être patients avant de voir son toit couvert et avoir un deuxième endroit ombragé assuré.     

Les musiciens du groupe « Uppsala » avec leurs instruments suédois installés à l’ombre de la pergola aux roses.

Pendant l’ouverture des jardins les 3 et 4 juin 2023, les bénévoles du jardin des simples ont réussi un accueil exceptionnel : sur la terrasse supérieure, appelée l’esplanade du bicentenaire, la présidente Aileen Sharp et son mari accueillaient les visiteurs avec des rafraichissements et des gâteaux. Descendus au jardin, Jocelyne les prenait en charge pour expliquer les transformations déjà accomplies. N’oublions pas ses aides qui l’avaient soutenue pour nettoyer et embellir le jardin et qui étaient  aussi prêtes à donner des réponses aux visiteurs. Edith s’était installée dans l’abri de jardin pour donner des conseils et vendre un assortiment de boutures  de plantes. Cette ambiance dynamique fut accompagnée  joyeusement par la musique de l’ensemble Uppsala. 

Edith à la vente des boutures et rhizomes d’iris

Revenons aux nouvelles installations et plantation du jardin. Nous avons déjà vu deux pergolas. Un berceau se dresse dans la niche de la tour. Ce berceau aussi a pu recevoir une plante mal lotie, la passiflore, une liane qui peut grimper sur plusieurs mètres de haut. Installée depuis longtemps elle n’avait ni arbre, ni mur pour se lancer. Donc c’est fait, elle a trouvé son équilibre.  Aux lianes déjà existantes, Jocelyne et son équipe ont ajouté 19 espèces  ou variétés nouvelles et les ont réparties sur tous les pergolas, berceaux et les murs. Le jardin va prendre beaucoup de verticalité !

 Le berceau de la passiflore

Quelle est la particularité d’une liane, souvent appelée plante grimpante ? Les arbres et  même les arbustes développent un tronc ou plusieurs troncs qui garantissent leur stabilité dans le sol et la distribution de la sève. La liane ne possède pas de tronc, elle est obligée de s’accrocher à un autre végétal ou un soutien de fortune. Avant de grimper elle développe un feuillage abondant qui captera la lumière et ainsi beaucoup d’énergie pour développer ses tiges et la manière de s’accrocher. En énumérant les différentes manières d’accrochage, je vais présenter les lianes du jardin des simples : Le plus solidement accroché est le lierre au mur à côté des roses avec de véritables crampons. Le schizophragma hydrangeoides aussi  possède des crampons, mais n’endommagera pas la structure comme le fait le lierre. La vigne vierge au-dessus de l’abri de jardin possède des vrilles à pelotes adhésives, tout comme la bignone. La vigne se tient accrochée avec des vrilles comme la passiflore, la rose avec  des épines et aiguillons. La plupart des lianes  s’accroche par enroulement plus au moins fort : les trois clématites, le chèvrefeuille, la pandorea jasminoides, l’akebia quinata, le kiwai, le houblon, l’ipomée, le haricot d’Espagne, la mina lobata, la thunbergia et les diverses courges (ces dernières 5 lianes sont des annuelles). Un dernier groupe s’appuie  tout simplement  contre un mur ou un autre objet: le bougainvillier et  le jasmin officinal.

Contre la muraille, mais aussi au milieu des anciens massifs de plantes médicinales, aromatiques  et condimentaires se dresse cette nouvelle arche 

Contre la muraille, mais aussi au milieu des anciens massifs de plantes médicinales, aromatiques  et condimentaires se dresse cette nouvelle arche  

Les tiges des lianes  sont comme des cordes marines faites de plusieurs torons, donc très solides et souples à la fois. Elles ont la faculté de se réitérer  facilement quand elles sont brisées ou endommagées. Elles développent en général des racines très profondes, craignant la sècheresse. Pour pouvoir pomper la sève des racines jusque dans les hautes tiges, les lianes sont pourvues de vaisseaux très longs et larges. La sève y est envoyée avec une grande pression pour éviter des bulles d’air. Il m’est arrivé de briser une tige de kiwi, la sève jaillissant m’a effrayée. Les lianes de notre jardin sont dans leur majorité des plantes d’agrément, mis à part les fruits du kiwai, du haricot, de l’akébia quinata, des cucurbitacees et du houblon qui sont comestibles ; la passiflore est une plante médicinale. Rappelons que de très importantes plantes alimentaires nourrissant une grande partie de l’humanité aujourd’hui, sont des lianes : l’igname, le manioc et la patate douce ; la vanille et le poivre sont des lianes condimentaires, utilisées partout dans le monde. La plupart des lianes vivent dans les forêts tropicales, on estime le nombre des angiospermes à 25000, mais seulement 7% sont identifiées  aujourd’hui. Il existe également quelques gymnospermes, des fougères- lianes, utilisées dans la recherche pharmaceutique. J’ai donné ici quelques bribes de connaissances sur des lianes tirées d’un livre passionnant qui a gagné le prix botanique à la fête des jardiniers au Lude en 2022 : « Eloge des lianes » d’Annik Schnitzler-Lenoble et Claire Arnold, deux jeunes chercheuses. La chronique botanique N°38  s’était intéressée au lierre dans les arbres autour du lac des Sablons. 

Une olla fabrication maison   

Les lianes de notre jardin des simples ont eu un départ fulgurant grâce à deux mois de pluie au printemps. Pour assurer une bonne continuation de la croissance, Jocelyne et son équipe ont installé une quinzaine d’ollas qui doivent garantir une irrigation douce et éviter des maladies. Elles ont également paillé le sol avec du chanvre pour garder l’humidité dans la terre sablonneuse du jardin. Soigné de cette façon remarquable, le jardin sera certainement très beau lors de la fête EC&J à la fin de l’été.

DEVINETTE N° 55

Quel est le nom de cette liane  d’un rose violet nouvellement plantée au jardin des simples ? Elle est très appréciée au Maroc. 

SOLUTION DE LA DEVINETTE 54

Il s’agit d’un acer japonais.

Précédent
Précédent

CHRONIQUE BOTANIQUE N° 56 LE SAULE BLANC ET LES HAIES SAUVAGES AU PARC DE LA CIGOGNE

Suivant
Suivant

CHRONIQUE BOTANIQUE N°54 UNE MOSAÏQUE DE TULIPES AU JARDIN « FRANÇAIS »